Si Antenne Suisse Explicitation m’était contée…

Préludes

Tout a commencé fin janvier 2006 à Paris avec une discussion entre deux personnes : Vittoria Cesari Lusso et Mireille Snoeckx. 

Oui, deux Suissesses à Paris… installées confortablement au restaurant Le Volcan, sur la place de La Contrescarpe. Une image de carte postale. C’est là que nous discutons pour la première fois de la possibilité de créer une association dédiée à l’entretien d’explicitation en Suisse !

En réalité, nous sommes déjà des complices depuis bien plus longtemps. Nous allons régulièrement en formation à St Eble, un village de Haute-Loire où Pierre Vermersch propose des formations et où il réunit les personnes intéressées dans le cadre de son groupe de recherche.  De même, nous participons aussi aux séminaires du Groupe de Recherche en Explicitation (GREX)  à Paris et nous assumons aussi toutes les deux des formations à l’explicitation en Suisse. 

Nous connaissons Karin Leresche Bouillanne qui participe régulièrement aux Séminaires expérientiels de St Eble. Nous avons eu ainsi l’occasion de travailler ensemble et de partager nos expériences pendant les activités que propose Pierre Vermersch. Nous partageons la même compréhension des potentialités que l’explicitation permet de développer, notamment la prise de conscience du vécu que nous considérons comme la clé du développement de la professionnalité.

Nous sommes donc en territoire connu quand nous nous rencontrons toutes les trois le 15 février 2006 à Genève pour tracer une esquisse de ce qui pourrait devenir une Antenne de l’explicitation en Suisse.

Premiers Pas

Nous commençons à rédiger les statuts de l’association en s’inspirant du savoir-faire de l’Association avec à Lausanne. Ce centre d’appui à la vie associative propose des modèles de statuts mais aussi un accompagnement différencié en fonction des buts et projets poursuivis. Le 27 avril 2006, nous signons solennellement les statuts lors d’une séance de l’Assemblée générale constitutive à Genève, une Assemblée constitutive des trois membres fondateurs. Je suis désignée volontaire pour assurer la Présidence et en ce 1er mai 2020, je le suis encore. C’est vous dire combien la fidélité est une marque de fabrique d’Antenne suisse. Vittoria est toujours vice-présidente et Karin Leresche Boulliane, s’est engagée à nos côtés jusqu’en avril 2013.

Déterminées à faire vivre l’explicitation en Suisse, très vite, nous choisissons d’organiser une journée de présentation à la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’éducation à Genève. Une journée du 7 octobre 2006 en deux temps : la matinée pour faire connaître les buts de l’association est ouverte à toute personne intéressée et, l’après-midi, des moments d’entraînement à l’explicitation sont proposés aux personnes ayant bénéficié d’une formation. 

En effet, nous avons déjà organisé des formations à l’explicitation, que ce soit dans le domaine de la Validation des Acquis pour des formateurs/trices ou pour des enseignant/es qui reçoivent des stagiaires dans leurs classes, que ce soit dans le Valais, à Lausanne, à Genève ou à Bienne, avec l’association EFFE, ou bien encore dans le cadre des Universités de Neuchâtel et de la Suisse italienne où Vittoria Cesari Lusso fait découvrir à ses étudiants, en formation initiale et continue, la richesse théorique et méthodologique de l’approche créée par Pierre Vermersch. Le questionnement en explicitation commence à être présent dans le paysage romand et tessinois ; la diversité des publics nous invitera à proposer des suivis à la demande et des approfondissements dans différents cantons.

En même temps, côté fonctionnement, nous décidons de contacter toutes les personnes susceptibles d’être intéressées aux enjeux d’une telle association pour faire partie du comité, notamment les personnes ayant déjà bénéficié d’une formation de base : au Tessin, Luca Bausch, et Sonja Pillet au Valais. Nous pensons qu’il est préférable que les personnes soient déjà certifiées en explicitation ou en voie de l’être. 

Quant aux relations avec le GREX, Pierre Vermersch a déjà été informé de la naissance d’une association Explicitation en terre helvétique par Vittoria et Mireille. La certification des formateurs/trices à l’explicitation reste, pour nous, du ressort du GREX. (PV du 3 juillet 2006)

Nous sommes prêt/es pour assumer la mise en place de deux journées de rencontre en Suisse par année et offrir ainsi des possibilités d’entraînement et d’approfondissement pour les personnes qui le souhaitent. Trois journées seront ainsi organisées entre Martigny et Genève, ce qui nous permet aussi de questionner nos pratiques de questionnement, de partager nos interrogations et de rêver aussi à d’autres moments de rencontre. Nous revisitons ainsi des fondamentaux comme le rôle du contrat, le choix des relances et surtout l’essentiel, la centration sur l’action et sur les conditions pour sa description au plus près de la réalité.

Explorations

Cependant, l’explicitation reste encore une approche qui circule dans la discrétion et reste méconnue des publics qui pourraient s’y intéresser. Les membres du comité souhaitent pouvoir présenter les techniques et la philosophie du questionnement, échanger avec différentes catégories de professionnels, notamment ceux qui travaillent dans les domaines de la formation et de l’accompagnement. L’idée de proposer un colloque pour annoncer l’existence de l’association, de présenter les ressources qu’elle peut offrir en Suisse est très vite envisagée. Très vite donc, nous sollicitons Pierre Vermersch et Nadine Faingold afin de mettre en lumière les liens entre le groupe de recherche sur l’explicitation en France et la nouvelle association suisse. 

C’est donc à l’université de Genève que sera organisé le premier colloque sur l’explicitation, avec une conférence de Pierre Vermersch, suivie d’un apéritif, le vendredi soir 7 novembre 2008. Une conférence accueillie avec un vif intérêt dans les locaux d’Uni Mail pour la centaine de personnes inscrites qui représentaient un éventail de professionnels relevant aussi bien du domaine de la santé, du social, de l’orientation que de la formation.

Le lendemain 8 novembre, une journée d’approche expérientielle avec deux Ateliers est proposée, l’un animé par Pierre Vermersch, l’autre par Nadine Faingold. C’est très important pour nous que ce colloque ait une composante importante d’expérientiel, que les participant/es puissent vivre des moments d’explicitation. C’est dans le vivre que les personnes peuvent approcher les techniques d’explicitation, en goûter à la fois la pertinence et la complexité. Nous souhaitons que l’explicitation soit connue et reconnue comme une approche phénoménologique d’intérêt professionnel, qu’elle soit mieux comprise dans la richesse de ses déclinaisons, qu’elle prenne une place dans l’univers de l’accompagnement et de la formation. 

C’est un premier pas pour visibiliser la présence de l’explicitation en Suisse et affirmer la nécessité d’une formation pour questionner le vécu avec des professionnels compétents. Lire le livre de Pierre Vermersch est une mise en bouche, mais, pour accompagner, il est indispensable  de pratiquer et de s’exercer. L’Association se présente comme une garantie de la qualité de la formation en explicitation.

Vitesse de croisière

Les premières années mettent en lumière la nécessité de clarifier la politique de l’association dans le domaine de la formation des adultes. En effet, les sollicitations qui nous sont faites transitent plus par les figures des formatrices, Vittoria Cesari Lusso et Mireille Snoeckx que par la présence de l’Association Antenne Suisse Explicitation dans le paysage romand et tessinois. 

Nous constatons qu’Antenne Suisse est d’abord un lieu pour s’identifier, un lieu de rencontre et un pôle d’échanges entre les deux langues. Nous allons donc instituer le dispositif de  deux Journées de rencontre et d’échanges chaque année, l’une au printemps, l’autre en automne, de manière à créer une communauté. Notre campagne de promotion s’effectuera avec une lettre de la présidente envoyée à toutes les personnes susceptibles d’être intéressé/es (lettre du 2 octobre 2006 annonçant la création d’une Antenne Suisse Explicitation et les journées d’octobre 2006 et de mai 2007).

C’est aussi en 2007 qu’un site sera créé, d’abord géré par la présidente, puis réorganisé et actualisé en 2016 par une webmaster Mme Sonja Widmer (Hana Tarabori, référente) et qu’il se transforme en 2020 avec les compétences de Mr Julien Pittolaz, (Corinne Divorne, référente). 

Antenne Suisse Explicitation (ASE) s’affirme ainsi comme un réseau, une toile tissée, une structure légère qui nous permet de rester le plus possible au plus près des ressources qu’il nous est possible de gérer. 

Le concept de faisabilité est au centre de nos échanges et nous choisissons d’élargir l’équipe de formation et d’accompagner les personnes qui souhaitent devenir formateurs/trices en explicitation. Mireille Snoeckx rejoint la Commission de certification/Habilitation du GREX (elle en fait toujours partie) et que Vittoria Cesari Lusso devient formatrice référente pour la Suisse romande et italienne. 

Par conséquent, l’équipe de formation s’enrichit de nouvelles personnes : au Tessin, Luca Bausch, en 2008 (bilingue Italien et français) et Alberto Cattaneo en 2010 ; en Romandie, Karin Leresche Boulliane en 2009, Sonja Pillet en 2010, Brigitte Gerber en 2014, Corinne Divorne et Christiane Sini en 2015,  Christine Chételat Béquet en 2017 et Hana Tarabori en 2019 (bilingue français et allemand). 

Nos formateurs et formatrices ont à la fois une habilitation Grex2 et une habilitation Antenne Suisse.

Ce qui est important de souligner, c’est que nous pouvons ainsi assumer les demandes dans différentes institutions et participer à des modules de formation qui ouvrent à des certifications pour les personnes en formation continue. Si l’équipe de formateurs/trices s’élargit, le comité restera fidèlement composé de cinq membres pendant de très longues années. En 2020, Elisa Cattaruzza nous rejoint au comité comme la première chercheure habilitée, renforçant ainsi le domaine recherche de notre association, un domaine que Vittoria Cesari Lusso  développe avec patience, conviction et ténacité. 

Cette habilitation à la recherche est une grande première dans le microcosme de l’explicitation. En effet, le développement des techniques d’aide à l’explicitation s’est ancré en première ligne dans le domaine de la formation et de l’accompagnement. Cependant, de nombreux travaux de recherche, de nombreuses thèses, aussi bien en France, au Canada, en Belgique et en Suisse recueillent des données avec comme méthodologie de recherche les techniques d’aide à l’explicitation. Dans ce domaine, nous constatons que les conditions de recueil de données en recherche, avec l’approche en explicitation, demande une expertise stratégique différenciée de l’accompagnement en formation. En conséquence, nous proposons un parcours d’habilitation comme chercheur/e avec, d’abord une formation de base en explicitation (format actuel de 8 jours), une connaissance des textes de base et des dimensions théoriques de la psycho phénoménologie ; être interviewée par une personne experte en explicitation, transcrire l’entretien et rédiger une analyse des relances, des effets des questions, etc. ; effectuer un travail de recherche d’une ou deux années avec une supervision d’un/e chercheur/e en explicitation. Les techniques d’aide à l’explicitation contribuent à la légitimation et aux dimensions méthodologiques de la recherche qualitative.

Grand large

L’originalité et les particularités d’Antenne Suisse Explicitation dans le paysage européen, notamment par rapport à la France, résident avant tout dans le plurilinguisme qui constitue l’esprit même de la Suisse. Nous pouvons apprendre à questionner les participants, les professionnels des métiers de la santé, de la relation et de l’enseignement, en français, en italien et actuellement aussi en allemand.

Avant même la constitution d’Antenne Suisse, Vittoria Cesari Lusso pense que l’ouvrage fondateur de Pierre Vermersch devrait être accessible, c’est à dire lu et travaillé en langue italienne. Elle va donc traduire et publier  « L’entretien d’explicitation » avec la collaboration d’Antonio Iannaccone. Ainsi Descrivere il lavoro. L’intervista di esplicitazione sera publié en 2005. Le Tessin est donc un canton phare dans une politique d’ouverture aux techniques d’aide à l’explicitation en italien et Vittoria Cesari Lusso, une pionnière de l’intégration de l’explicitation dans la recherche en Suisse ! 

En effet, il nous semble nécessaire et pertinent de ne pas cliver deux domaines qui s’interpénètrent dans la réalité : la formation et la recherche. Les colloques que nous proposons s’inscrivent toujours dans une interrelation entre ces deux pôles, ce qui favorise la mise en lumière de la méthodologie d’accès à l’expérience subjective. Le colloque des 3 et 4 octobre 2014, organisé en partenariat avec l’Institut de psychologie et d’éducation de Neuchâtel, sera l’occasion d’un numéro spécial de la revue Recherche et Formation : La subjectivité comme ressource en éducation et en formation

Ces colloques sont l’occasion de rencontres entre formateurs, formatrices, chercheur/es et favorisent ainsi l’élaboration de projets de recherche financés par des fondations. Un projet de recherche sur le thème « Nouvelles technologies de la communication et qualité de la vie relationnelle. Défis et ressources du point de vue des Grands-parents », présenté par Vittoria Cesari Lusso, Antonio Iannaccone et Sophie Lambolez sera primé en 2015 par la Fondation Leenaards. Ce projet met ainsi en lumière la pertinence de ressources théoriques et méthodologiques issues de la psycho phénoménologie et des techniques d’aide à l’explicitation.

Nos deux rencontres rituelles tiennent compte du paysage ouvert de l’explicitation et accueillent aussi un public n’ayant pas de formation de base à l’explicitation, notamment autour de thèmes phares comme l’analyse des pratiques. Ce sont des opportunités pour faire découvrir la pertinence du questionnement en explicitation pour ceux et celles qui ne  le connaissaient pas. Une occasion de redécouvrir la fragilité et l’émerveillement du revécu dans l’accompagnement.

La possibilité d’une île

Lors de nos journées d’échanges, notamment dans les cantons bilingues, nous avons constaté que, lors de la description du vécu par des personnes bilingues, il leur arrivait de passer spontanément du français à l’italien, de l’italien au français, du français au schwiizerdütsch … pour continuer en allemand ou en français ou en italien, selon ce qu’ils décrivaient. Cela ne posait pas de problèmes en soi, puisque l’essentiel est d’accompagner celui ou celle qui décrit son vécu.  Peu importe ce glissement d’une langue à une autre du moment que celui ou celle qui décrit s’y retrouve, qu’il peut mettre des mots et comprendre ce qui s’est passé pour lui, repérer ce qu’il ou elle a su faire ou ce qui lui a posé problème. Néanmoins pour l’accompagnant/e, la question des relances se pose. Reprendre plutôt les mots dans la langue commune ou continuer avec les mots de l’autre langue qui a surgi. Cette interrogation a émergé régulièrement, sans que nous prenions le temps d’un partage et d’un débat sur l’usage et les effets des différentes langues dans la description.

Quatre langues officielles ont droit de cité en Suisse: français, italien, allemand/schwiizerdütsch (plusieurs dialectes), romanche. D’un point de vue linguistique, l’allemand présente des spécificités lexicales et syntaxiques qui peuvent, c’est une hypothèse, modifier le déroulement de l’entretien d’explicitation. Au comité, nous avons plusieurs personnes bilingues, notamment italien/français, mais aussi en langue allemande. Pour l’habilitation à la formation aux techniques de l’entretien d’explicitation, Hana Tarabori a choisi d’effectuer aussi des entretiens en allemand. Nous avons donc déjà quelques données, mais pas encore de débat sur la possibilité d’ouverture à une troisième langue. Cependant, en 2017, il nous semble qu’approfondir ce qui se passe lorsque le questionnement s’effectue en allemand est une perspective d’avenir pour notre association, mais aussi pour les professionnel/les concerné/es.

Le comité décide de financer une étude exploratoire pour comprendre les enjeux du questionnement en explicitation en ce qui concerne la langue allemande : format des questions, formulation du contrat d’alliance et d’évocation, relances sur les verbes d’action notamment. Mais il y a plus que la dimension linguistique. Les Suisses germanophones sont très à l’aise avec la langue allemande standard, (Hochdeutsch), mais ils apprécient de parler en suisse-allemand chaque fois qu’ils en ont l’occasion. Tous savent s’exprimer parfaitement en allemand et le font sans hésitation quand le contexte le demande. 

Il nous semble donc essentiel de prendre en compte ces deux directions linguistiques : à la fois le questionnement en allemand dit standard et le questionnement en schwiizerdütsch. Sur décision du comité, un mandat de recherche exploratoire est proposé à deux formatrices compétentes en techniques d’aide à l’explicitation : Hana Tarabori (Lausanne) et Michaela Knuchel-Bossel (Bienne). 

Un rapport « DAS VERDEUTLICHUNGSGESPRÄCH » est présenté le 31 août 2018. 

« L’allemand, c’est pas du français ! C’est le titre d’un livre bien connu des enseignants d’allemand ! Mais au-delà de l’évidence, l’allemand présente des spécificités lexicales et syntaxiques qui peuvent, c’est notre hypothèse, modifier le déroulement de l’entretien d’explicitation. Par exemple, nous faisons l’hypothèse que le vaste choix de particules permet en allemand d’être plus précis dans la description de l’action ; ou encore nous nous posons la question de l’effet que va avoir la place du verbe à la fin de la phrase. »

C’est à partir de ces hypothèses que les deux chercheures vont pratiquer des entretiens, retranscrire et analyser les données obtenues. C’est une première dans le microcosme des techniques d’aide à l’explicitation en Suisse, en France, en Belgique et au Canada ! 

« Par contre, lors de notre étude, nous avions pensé que la structure grammaticale de la langue allemande pouvait peut-être être un obstacle pour une entretien d’explicitation. Cette crainte s’est avérée caduque, car nous avons pu constater que le fait de devoir attendre la fin de la phrase pour connaître l’action était plutôt favorable à l’explicitation. Cette attente est tout à fait dans l’idée du ralentissement, c’est donc une aide à la description du vécu et cela facilite l’accompagnement en explicitation. De plus, nous avons aussi constaté que lorsque la personne est en évocation, elle s’exprime souvent avec des phrases très courtes, donc à nouveau, le fait que le verbe soit à la fin de la phrase ne gêne pas du tout. »

« En conclusion, nous avons donc pu constater qu’un entretien en allemand ou en suisse-allemand est tout à fait possible et que la structure de la langue n’entrave en rien l’approche, ni la profondeur de l’expérience et finalement est identique à ce que nous utilisons en français. » p.3 (traduction du rapport en français de Hana Tarabori et Michaela Knuchel-Bossel).

Ce rapport comporte aussi un glossaire, un mini-guide, ouvre de nouveaux questionnements, et laisse envisager des perspectives à discuter en comité et en pensant avenir.

Les ancrages

Une des dimensions des objectifs de l’association, c’est de développer la pratique de l’explicitation en Suisse. L’accent est mis sur la formation des professionnels, sur l’apprendre. Apprendre à pratiquer les techniques d’aide à l’explicitation dans son cadre professionnel. Apprendre, pas enseigner les techniques… C’est dire si la formation va être un des pôles majeurs de l’activité de l’association. Voici quelques étapes…

Très vite la présidente est sollicitée pour assumer des formations, avant d’être la présidente d’ailleurs, avant même qu’Antenne Suisse soit à l’horizon. Cela commence avec une expérience magnifique avec une équipe de profs loin de leur quotidien institutionnel dans le restaurant/hôtel des Brenets. Une expérience qui met en lumière la nécessité pour les formateur/trices à l’explicitation d’une ouverture aux questions, aux doutes et surtout à la sensibilité nécessaire pour accueillir toute la gamme des relations entre participant/es. 

C’est ensuite dans le Valais francophone que vont débuter les premiers cours de formation à l’explicitation dans le cadre de la formation continue des enseignant/es d’appui à St-Maurice et à Martigny dont voici le libellé : 

  • Avez-vous été confronté-e au fait qu’il ne suffit pas de prescrire la conduite à tenir pour aider un enfant à se perfectionner? 
  • Avez-vous besoin de savoir comment un enfant s’y prend pour réaliser un exercice? Comment une erreur, une performance peu efficace a-t-elle été générée ? 
  • Avez-vous besoin de recueillir des informations suffisantes pour comprendre comment cela c’est produit , pour comprendre comment vous avez fait ? Et pas seulement repérer que ce n’est pas la bonne réponse, ou pas le bon niveau ?
  • Souhaitez-vous mieux comprendre votre pratique ?

L’entretien d’explicitation est un ensemble de  techniques qui  ont pour but de favoriser, d’aider, de solliciter la mise en mots descriptive de la manière dont une tâche a été réalisée. L’entretien d’explicitation vise donc en priorité la verbalisation de l’action (matérielle ou mentale), telle qu’elle est effectivement mise en oeuvre dans l’exécution d’une tâche précise. Ces techniques peuvent être utilisées en situation d’entretien à deux, ou peuvent être intégrées à des situations de groupe comme en classe, en formation ou en analyse de pratique.

La formation à l’explicitation est une formation expérientielle (Vermersch). Les participants occupent tour à tour les positions d’interviewé, d’intervieweur et d’observateur. Les exercices de questionnement sont nombreux et les points théoriques s’articulent aux constats effectués par les personnes en formation.

Au cours de ces plusieurs éditions, un compagnonnage s’ouvre pour assumer les sessions de formation et élargir le cercle des formatrices habilitées : Karin Leresche Bouillane, Brigitte Gerber, Sonja Pillet. Ces premiers pas en explicitation en territoire Valaisan vont continuer à la demande des enseignantes qui le souhaitent, soit en séminaires d’entraînement ou d’approfondissements en collaboration avec Sonja Pillet. Un séminaire d’éthique et des propositions de cours d’analyse de pratiques sont ainsi développés avec toujours en toile de fond et en pratique, l’explicitation !  

En parallèle, Vittoria Cesari Lusso continue les formations en explicitation au Tessin, particulièrement dans trois cadres : formation de base à l’Istituto Universitario Federale per la Formazione Professionale (IUFFP) en collaboration avec Luca Bausch et Alberto Cattaneo comme assistants; formation des médiateurs scolaires (IUFFP); module de formation pour Directeurs/trices d’établissements scolaires, axé sur la gestion des relations interpersonnelles qui a lieu à l’Université de la Suisse italienne. Luca Bausch et Alberto Cattaneo – après la certification comme formateurs –  prennent la relève et intègrent l’explicitation dans leurs pratiques professionnelles à l’IUFFP.   

En Suisse Romande, d’une part Vittoria Cesari Lusso anime régulièrement des journées d’introduction à l’Entretien d’Explicitation, qui ont lieu aux Universités de Neuchâtel et Genève, à l’intention des maîtresses de stage en logopédie ; d’autre part, elle forme des collègues chercheur-e-s des Université de Lausanne et Genève qui participent à un projet de recherche sur trois ans primé par la Fondation Leenaards en 2019. En outre elle intègre constamment les techniques d’aide à l’explicitation dans le cadre de ses consultations cliniques et supervisions.

Ce qui va se déployer en Romandie, c’est, non seulement la formation de base en explicitation en tant que telle, mais l’intégration d’une formation à l’explicitation dans les différentes formations offertes par les Hautes Ecoles Pédagogiques de Suisse Romande, notamment. Que ce soit la Formation à la Médiation Scolaire, à la Supervision, à la Formation des formateurs/trices en établissement (HEP Bejune), ou de praticiens formateurs/trices (HEP Lausanne), il y a un module formation à l’explicitation qui assure au moins les premiers fondements et une initiation aux techniques ! Et toute une équipe pour les assumer : Christine Chételat Béquet, Corinne Divorne, Brigitte Gerber, Mireille Snoeckx, Christiane Sini et Hana Tarabori.

Pour toutes ces nouvelles professionnalisations, le passage par un module explicitation devient une nécessité transversale de fait. Ainsi, sous différentes modalités, la formation à l’explicitation a une place dans le parcours des étudiant/es et des professionnel/les, que ce soit dans les plans de formation des Hautes Ecoles pédagogiques romandes (HEP), à la HES de santé et du social à Genève, dans les Instituts de Formation professionnelle Romande (IFFP), ou encore dans les formations FFP niveau Ecole supérieure, à l’ESSIL et à l’ESEDE, (mandat de l’IFFP). À l’université de Genève, un module Explicitation est proposé aux Formateurs/trices en établissement du Secondaire qui reçoivent des étudiants/es en formation.

Nous participons donc activement à l’accompagnement des recueils des données dans les formations continues qui ouvrent à des rôles nouveaux, comme la médiation scolaire ou la supervision des professionnel/les dans les établissements. Nous intégrons l’explicitation dans

C’est dans un climat de confiance et de réciprocité qu’Antenne Suisse Explicitation signe une Convention de collaboration avec l’IFFP de Renens le 1er juin 2018. 

La Convention de collaboration définit les obligations des partenaires de la formation, notamment la participation d’Antenne Suisse explicitation au groupe de pilotage et au groupe de coordination de l’Institut fédéral des hautes études en formation professionnelle ;  

Elle garantit la présence de l’explicitation dans les programmes de différents CAS : CAS Mesures de soutien pédagogique ; CAS Bases de l’accompagnement dans la formation des responsables de la formation professionnelle ; CAS Accompagnement Clinique en soins spécialisés. 

L’association assure la qualité des prestations offertes et des mesures de qualification des participant/es. Elle s’engage à mettre des formateurs/trices au bénéfice des qualifications et des compétences requises afin de répondre aux demandes de formation.

Un bout de chemin ensemble

Depuis 2006, le comité d’Antenne Suisse Explicitation assume ses engagements, entre Formation, Recherche, Journées d’échanges et colloques. Des liens sont toujours entretenus avec le GREX2, la présidente fidèle aux Séminaires organisés à Paris. Nos collègues français sont des invités privilégiés pour participer à nos rencontres, colloques ou Journées. Le Journal Expliciter est un bien commun qui nous mobilise, nous interpelle et nous cheminons avec l’explicitation dans le cadre de nos cantons.

Le nouveau site est l’opportunité de nous poser des questions sur l’avenir, sur les chemins à continuer, sur d’autres, peut-être à découvrir.

Mireille Snoeckx
Mai 2020